Cosmogonies Zinzou

Cosmogonies, Zinsou, Une collection africaine, Hôtel des Collections
Cette initiative privée, une Collection, installée au Bénin, nous ouvre les portes d’un art africain tel qu’en lui-même l’éternité le change, de manière assez fidèle, du moins sur les trois composantes essentielles qui le représentent : peinture, sculpture et surtout la photographie. C’est elle qui se taille la part du lion dans ce parcours structuré en sept étapes qui va des Alphabets et Codes (Dessins sur papier calque pour les Répertoire de l’ivoirien Frédéric Bruly Bouabré, huile sur toile longitudinale d’Esther Mahlangu, africaine du Sud, avec figures traditionnelles géométriques…) aux Métamorphoses (Terres cuites de la sénégalaise, Seyni Awa Camara pleines de fantaisie brutes et anthropomorphes ; imposante installation circulaire en tour de Babel de la tunisienne Aicha Snoussi à base de bouteilles à messages posées sur socle de béton et offrant une Sépulture et aux noyés, Ombres sur toile de Gérard Quénum…) qui clôt l’exposition. Cette dernière, d’une grande richesse et diversité : elle mêle en effet les sexes (Pauline Guerrier et ses cheveux totémiques, Lyndi Sales et ses fils sur papier, Mahlangu, Snoussi, Camara), les origines (Tanzanie pour Georges Lilanga, ses encres et aquarelles ; Burkina Faso pour Sanlé Sory et ses portraits de jeunes dans le vent, Congo pour Saly Bajoli et son installation à base de plaques de cuivre, Nigéria pour le regretté photographe homosexuel Rotimi Fani Kayode, algérien pour Saadek Rahim et son tapis manquant…), mais aussi les générations (Le célèbre malien Sadou Keïta, né en 1921, décédé en 2001…, Romuald Hazoumé, du Bénin, né en 1962, l’ivoirien Ishola Akpo en 1983) et bien sûr les styles, en évolution, à partir du moment où les artistes du continent rejoignent le marché de l’art international ou qu’ils sont confrontés à des influences majeures (Basquiat, Keith Haring…). La photographie par exemple démarre sur du noir et blanc : les portraits typiques de Sadou Keita, en studio, d’Adama Kouyaté et ses familles nombreuses témoignant d’une authentique fraternité, ceux plus ironiques de l’angolais Jean Deparra, ceux plus festifs de Malik Sidibé, les coiffures incroyables de J. D.’Okhai Ojeikere… Or la couleur gagne vite du terrain (portraits motif sur motif d’Omar Victor Diop dans sa série du Studio des Vanités ; Demoiselles nues et masquées de Léonce Raphael Abgodjelou ; reines d’un jour ou Pouvoir de Femmes de Ishola Akpo). Elle se fait de plus en plus sociale et revendicatrice, voire politique et n’hésite pas à sortir dans les rues des villes, à suivre les motocyclistes jumeaux charriant des dizaines de bidons cachant leur identité, de Romuald Hazoumé. Egalement pour le photographe à payer de sa personne le temps de quelques autoportraits performants et métamorphiques tel le camerounais Samuel Fosso et ses divers rôles : celui de Chef qui a vendu l’Afrique aux colons ou celui d’une femme américaine libérée des années 70, entre fascination et défiance. Zanele Muholi se situe dans la mouvance militante des causes identitaires et LGBT. La photo est à la fête mais la peinture a ses vedettes : le peintre reporter Moké et ses scènes de rue ; évidemment le congolais Chéri Samba et son intérêt pour l’événementiel, le côté pop de Chéri Chérin, hiératique d’Amadou Sanogo. L’Afrique aura apporté sa pierre à l’édifice de la figuration telle qu’elle se maintient régulièrement sous forme libre ou narrative. Elle se fait surréaliste chez Pierre Bodo, primitive et religieuse chez l’omniprésent Cyprien Tokoudagba, pleine de mystère et de spiritualité d’un autre monde. Il faut également parler des objets récupérés par Aston et qui en fait de délicates éminences flamboyantes, de l’installation de poteries de toutes dimensions du malgache Joel Andrianomearisoa, rythmée par un poème d’Apollinaire, des multiples masques cimiers de Kifouli Dossou et du casque de cosmonaute d’Emo de Medeiros. Rigobert Nimi s’inspire dans ses maquettes des stations spatiales ancrant le continent africain dans le futur. On ne peut citer toutes les œuvres marquantes d’une telle exposition, de sa section Identité et mémoire à ses Mythologies et Symboles en passant par La vie comme elle vient, Poses et mises en Scène et Distance critique. On en ressort convaincu que bien des artistes méritent une relecture de notre Histoire de l’art universel et que, ma foi on, aimerait bien en voir quelques-uns dans nos musées occidentalocentristes et americanomaniaques. BTN
Jusqu’au 10-10, 13, rue de la république, 0499582800

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