Othoniel

Jean-Michel Othoniel, Le Palais des papes, Collection Lambert et autres lieux, Avignon.

Du fameux pont où l’on danse, avec sa porte en croix qui rend hommage aux navigateurs de sa majesté le Rhône, à la Chapelle Ste Claire où repose un cœur de perles rouge sang dévolu aux deux amants, Laure et Pétrarque, sur les lieux mêmes de leur rencontre… Jean-Michel Othoniel nous invite à un parcours à la fois amoureux (Les Fantômes de l’amour), astronomique (Cosmos) et quelque peu aquatique car, de toute façon, il nous faudra naviguer d’un lieu à l’autre. En témoignent : ce tapis de briques bleu qui tourbillonnent dans la Grande Chapelle du Palais des papes et pouvant illustrer le thème du temps qui s’écoule, sous le regard des grands mouvements cosmiques ; telle fontaine du jardin médiéval apparentée à celui des Délices ; ou son intervention dans les Bains Pommer où les fontaines se nichent en miniature dans les cabines de soin. L’amour est partout : dans le cénotaphe de la chapelle Martial (PDP), inspiré d’un tableau célèbre de Poussin évoquant l’âge d’or (Et in arcadia ego), en brique bleu et or, ou Chapelle St Jean, où le tombeau semble creusé dans le parterre de briques. Il est aussi dans les colliers multicolores de la Tour des anges, où les perles s’égrennent pour des amants suspendus à leur passion. Ou dans le Petit Palais Louvre, qui abrite la Collection Campana, en lequel Othoniel a multiplié les références à l’amour sacré à travers des réalisations circulaires, en verre diaphane et doré, inspirées des auréoles des tableaux renaissants. Certes, le Palais papal, à tout seigneur tout honneur, se taille la part du lion, ce qui est un peu logique au vu de ses espaces immenses. On peut y admirer la série d’encres florale, sur feuille d’or blanc, qui s’alignent le long d’un mur du Grand Tinel (et qui se poursuit, herbier merveilleux, au Muséum Requien en hommage à la rouge garance, ou dans la cour du musée Calvet, avec une fleur de lotus géante et argentée) ; la tornade fossilisée de briques en inox miroité (Yan dang) de la Chambre antique du Camérier, Le grand lasso de perles de verre du Trésor Bas, qui s’enroule autour d’un pilier ; les 12 constellations suspendues dans la Chambre de parement, ou encore la référence au nœud de Lacan (entrelaçant réel, imaginaire et symbolique), en perles noires, pour rappeler les liens puissants de l’amour, dans la Grande Trésorerie. Tout est démesuré, partant adapté au lieu, à l’instar de l’immense astrolabe du cloître Benoit 12 et qui répond à celui, public, de la place du Palais, non moins longiligne, manifestement inspiré d’une fleur avec sa tige et ses organes de reproduction. Il invite non seulement à naviguer mais à aller y voir de plus près. Les allusions astrologiques sont multiples, par référence à l’univers médiéval du lieu, et parce que les astres, à l’échelle humaine, c’est ce qui dure quand nous sommes amenés à périr. Les 4 Cosmos qui surplombent la rivière de la Grande Chapelles sont là pour nous le rappeler. La mort n’est pas oubliée avec les Wonder Block ou monolithes du Musée lapidaire, où au mausolée constitué de briques enchâssées, ornées de colliers, lequel répond aux tombeaux de pierre tout proches. La Collection Lambert accueille également le sculpteur, avec des œuvres plus sobres, plus compactes et géométriques notamment face à des Carl André. Ici on découvre une brique ancienne au soufre, parmi de discrets Richard Tuttle, qui détermina sans doute les séries ultérieures. Là une pierre d’obsidienne noire, polie et qui réfléchit ce qui l’entoure ; face à un wall-drawing permanent de Sol Lewitt, une rivière de briques. Tout est pensé soigneusement : Aux enfilements de Cadere répond une suspension perlée. Face à des peintures de Twombly, Othoniel opte pour des lithographies tachistes ; un œuvre murale répond aux propositions de Donald Judd ; face à une photo de solfatare, par Nan Goldin, d’anciennes concrétions en soufre ou obsidienne ; à côté d’un triptyque de Brice Marsden, une proposition de monochrome, un autre wall-drawing en vagues inspire une concrétion de briques bleues fluviales, etc. Les courbes laissent place à des formes minimalistes, toujours avec les mêmes matériaux, le verre en particulier, ou l’inox, qui dialoguent avec les œuvres de la collection. Dans la ville, certaines œuvres sont éclairées la nuit comme magie tandis que la lumière du soleil intensifie les couleurs. Au bout du compte, un double anniversaire, celui la Collection Lambert que la surdouée a bêtement laissé échapper ; celui la nomination en tant que capitale européenne de la culture, titre que la surdouée n’a que convoité… Et le troisième pour la ville d’Avignon dont on ne soupçonne pas la richesse muséale. BTN

jusqu’au 04-01-2026

 

 

 

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