Nous apprenons avec tristesse le décès de notre ami et collègue Gilbert Lascault, survenu le 19 décembre 2022. Né en 1934, il était homme de lettres et de radio, il avait été professeur en philosophie de l’art à l’université Paris-I, et régent de tératologie & dinographie au Collège de ‘Pataphysique. Après des études marquées par d’originales recherches autour de la figure du monstre dans l’art occidental, il était devenu critique d’art pour de nombreuses revues : TXT, Revue d’esthétique, Les temps modernes, L’art vivant, Traverses, L’Arc, N.R.F., La Quinzaine littéraire, Cimaise, art press, Artstudio, XXe siècle… Il défendait des artistes dans leur singularité, non par désir de former un groupe autour de lui, et avait écrit sur Gianfranco Baruchello, Marinette Cueco, Robert Malaval, Pierrette Bloch, Alfred Kubin, Gina Pane, Bertholin, Eve Gramatzki, Bernard Réquichot, Dorothée Selz, pour n’en citer que quelques-uns et quelques-unes. Son écriture volontairement fragmentaire, jamais surplombante, souvent fictionnelle, mêlée de références littéraires et philosophiques sans verbiage, a marqué celles et ceux qui ont croisé son chemin. Il s’intéressait à l’art brut, à la bande dessinée, aux nœuds, à la poussière, aux détails autant qu’aux contes de fée, au maquillage, aux graffitis et aux jardins. Il était ce qu’on appellerait un esprit curieux, dont les écrits manifestaient avec discrétion des émotions joyeuses ou amoureuses.
Il revendiquait en 1978 dans son texte manifeste « Pour une esthétique dispersée » une critique d’art refusant « les saisies générales, la presbytie, le long souffle des discours éloquents », lui préférant « les petites mélodies morcelées d’un flutiau essoufflé, timide »