DERNIERS JOURS
La rétrospective des photographies d’Eric Bourret se développe dans 4 salles et s’achève dans la chapelle de la Vieille Charité à Marseille, avec en point de mire, en miroir, cet oculus inversé : le ciel est à terre.
Si ce sont véritablement des photographies de 2013 à 2021, on se demande s’il n’y a pas également des interventions du dessin, de la gravure, de la peinture, tellement le protocole de la prise de vue est particulier. Pas de post-production mais une multitude de prises de vue d’un moment, d’une journée, qui se superposent, compilées sur le même négatif ou fichier en marchant. On dirait bien que la matière arrive lentement en couches, en transparences, j’allais dire : « en transpiration ». Physique, organique, à fleur, à ras, à fleur de peau on perd le topos pour s’attarder dans le rythme de la pulsation cardiaque induite par la marche et la respiration jusqu’à la méditation, l’hallucination.
On pourrait presque sentir la paroi rocheuse des falaises Sardes sous les doigts ou plus localement, les lichens d’Islande, les sapins et autres branches des forêts primaires de Chine et de Norvège. Se noyer ou barboter en Méditerranée et en apnée aux côtés d’Eric Bourret. Le verbe « s’immerger » et le nom « immersion » prennent tout leur sens, sans effet de mode.
Somme considérable de travaux exigeants et de voyages comme les appréhende si bien l’arpenteur avec un accrochage irréprochable. Riche déambulation dans son univers des éléments sensibles, des forces telluriques et cosmiques où la décontextualisation orchestrée, pousse le regardeur à se poser et à
creuser l’image hors repères géographiques.
Matière velours, texture tangible, souci du détail offerts à celui qui s’approche et regarde. Le paysage n’en n’est pas un ou bien, il est une somme. Voici donc quelques séries, Dans la gueule de l’espace, Sainte-Victoire, Echoes, Pangaea, No limit, Zéro l’infini, Primary forest, Hot spot, où les titres donnent la mesure du poème. On vibre ou tremble, c’est selon. On prend son temps. Dans l’expédition et pas dans l’expéditif. Le flux et le flou dans le pouls de l’univers.
Sophie Braganti
Expositions individuelles
Centre de la Vieille Charité, Marseille / FLUX / > 27 février
Musée de Lodève / TERRES / 30 avril – 28 août
Collectif
MuMa – Musée d’art moderne André Malraux, le Havre / LE VENT « Cela qui ne peut être peint » / 25 juin – 2 octobre