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Tempus fugit, utere
La notion du temps est au cœur de l’œuvre de Damien Gete. Quelles traces laissons-nous au monde ? semble-t-il nous dire. Sa double résidence -à l’H du siège à Valenciennes et à L’être lieu à Arras- dans le cadre du dispositif Watch This Space, lui a permis d’approfondir sa réflexion. Dans les quatre œuvres crées lors de cette résidence, Damien Gete a mis en place des procédés qui, même si le résultat plastique diffère d’une œuvre à l’œuvre, peuvent déjà être appréhendés comme des constantes de son œuvre. Ses gestes créatifs apparaissent ainsi : le recouvrement, façon de figer les éléments ; l’agrégation pour assembler en une partie des éléments aux temporalités différentes et le relevé d’empreinte pour garder la trace de ce qui fut. En devenant le lieu dépositaire de gestes consignés ou exposés, sa sculpture devient écriture dans l’espace : il consigne la mémoire des choses non pas dans un texte mais dans un dispositif universel : le monument, l’ex-voto, la gerbe, d’ailleurs ses œuvres se nomment : Monument pour un imaginaire, Par le moindre vestige, Ex Voto, et Totem. Au fur et à mesure que se multiplient, par exemple, les répliques en plâtre de fragments de son corps ensuite agrégés, on a l’impression d’être face à plusieurs corps, à des danseurs, les gestes sont signifiants et il y a là le début d’une narration. Son geste créatif se déploie dans ce qui s’apparente à des rituels, dans un processus presque incantatoire, quelle que soit l’œuvre produite. Pour lui la sculpture est un lieu rituel où s’agrège le temps par l’action du corps. Sa sculpture est son corps et son corps est mouvement. Matière et esprit ne font qu’un ; Il y a une dynamique de la pensée et son développement est mouvement, série de positions et d’articulations. Trouver l’articulation entre toutes ces positions c’est libérer un flux, et le flux c’est la vie, c’est être au cœur du réel. Est-ce sa façon de conjurer le sort ? d’arrêter le temps ? Programme courageux, Tempus fugit, utere !
Céline Berchiche, janvier 2022