Bonsoir,
Veuillez trouver un texte sur une exposition d’ Agnès Geoffray, publié en 2020.
Exemple à remettre pour la bourse EKPHRASIS, juin 2021
Cordialement,
Nathalie Gallon
Ce mail fait suite au mail précédent où il y avait la note d’intention pour Claude Como
« Dans une posture d’iconographe, je sonde, élabore et réactive les images. Par le biais de mises en scène, de ré-appropriations ou d’associations photographiques ou textuelles, je révèle un univers de tensions – latentes et mystérieuses. » Agnès Geoffray« L’art, c’est l’enfance, voilà. L’art, c’est ne pas savoir que le monde existe déjà, et en faire un. Non pas détruire ce qu’on trouve, mais simplement ne rien trouver d’achevé. Rien que des possibilités. » RilkeCarambolage au pays de l’imageLa plasticienne Agnès Geoffray transforme la survivance des traces de l’histoire, sous forme de photographies et pose la question : que reste-t-il de l’image?Il ne s’agit pas pour elle simplement de savoir ce qu’elle signifie puisqu’il faut s’interroger sur sa vie et sa transmission.Sa méthode fonctionne plus par résonance, dans ses réalisations, par une mise en forme soignée : l’image intègre les aspects historiques et sociaux, en plus de son rapport à l’esthétique.Elle ne cesse d’analyser les détails d’un cliché par rapprochement et similitude.Par une sorte de symbiose entre le croire et l’agir, elle mêle l’évidence supposé et l’étrangeté.Elle touche le regard du spectateur, mais aussi ébranle la condition de l’implication du corps.C’est sous forme d’allers et retours du modèle originel vers celui, transformé, de l’artiste que se constitue l’essence même de son travail, par un mouvement mais aussi par le constat de la prise de conscience des plis qui pris ensemble éclaire la matrice d’où elle se déplace:Le foulard militaire en soie imprimée de cartes pendant la seconde guerre mondiale ou le parachute, 2019, de la seconde guerre mondiale sur lequel des mots écrits sont brodés en rouge en témoignent.Son approche met l’accent par une série de fragments, fondateurs d’une oeuvre afin de faire le lieu entre l’avant et l’après, par la découverte de perspectives restées inaperçues. Elle remet en lumière par la falsification d’images vernaculaires issues d’ archives afin de mieux la re-contextualiser en gommant un détail qu’elle modifie.Dès lors, se pose la question dont l’image nous parvient, sur leur puissance historique et leur part de fiction.Des images qui prennent racines dans des représentations violentes de conflits, largement étudiés . Agnès Geoffray en fabrique une nouvelle version pour agir sur leur réalité.Par un travail d’ajustement, elle met en rapport depuis un angle déviant, et entraine le regardeur, détourne son attention qui ne porte plus uniquement sur la surface mais sur le contenu.Dans le diptyque, Libération 1 et 2, 2011, elle interroge ce qui se dérobe à la vue du premier regard. Elle se méfie de ce qui saute aux yeux. Elle bondit par dessus la linéralité du temps.Une renaissance avant de replonger à la source. En « en robant » le corps de cette femme, on passe d’une scène violente, aux sourires satisfaits des hommes qui saisissent ses poignets à pratiquement une scène de danse, dans la rue. En choisissant, en sélectionnant un détail, une action, un tremblement, elle nous immobilise non pas dans le perdre ou l’égarement.Tout au contraire et c’est sa force, elle recadre se décalant, d’un autre point de vue, pour provoquer une nouvelle attention. Après un silence, dont la durée dépend du temps passé à la stupéfaction de l’emprise ou victimisation.Il existe dans les actes d’Agnès Geoffray une répétition du mode opératoire du motif, quelque chose qui insiste dans ses actes de regard. «Le choc de l’obus » qui a atteint des milliers d’hommes pendant le cataclysme, transmis par le danseur Jérôme Andrieu, vacillant, sous forme de vidéo est d’une exemplarité accomplie.Pour comprendre une image, l’expérience enseigne qu’il faut se mettre, en la regardant, à l’écoute de sa teneur temporelle. Selon un rythme souvent binaire qui implique l’image (ou l’objet)simultanément, la plasticienne combine des emblèmes dupliqués, fréquemment en binôme ou plus, chacun d’entre eux présente un détail différent du voisin, en décalage. Les variations se révèlent complexes parfois, bourrées d’interférences, par des assauts irréguliers, espacés, accélérés, puis ralentis. Parfois, face à des photographies manquantes, elle fournit elle-même le matériau, sous forme visuel ou grâce à son propre alphabet, des histoires écrites. « Résultant d’un processus de reconstruction fictionnalisée », précise-t-elle, l’artiste invente des histoires, dont certaines utilisent un vocabulaire dix-neuviémiste.Les mots sont souverains dans ses créations. Dans « Palimpsestes », 2012, les verbes sont épinglés au mur. Des papiers et tracés d’une écriture secrète donnent voix et corps à un langage oublié dans les « Messagers »,2014. Ou, encore, ces écrits, qui sont des appels à la résistance, ont valeur de tracts, qui sont glissés dans les poches des soldats allemands.Il en surgit un passé qui percole le présent, une interprétation fine, poétique et politique de l’histoire, à travers le pouvoir des images.Initialement prévue jusqu’au 5 mai. En raison des mesures sanitaires en vigueur, l’exposition devrait être prolongée.