5 présentations expos d’été (Miam, Musée Soulages, Musée Paul Valéry, Luma Arles, La Mouche).

Superbemarché au Miam

Encore une expo qui ravira le grand public d’autant qu’elle est fournie, colorée, assez diverse et qu’elle se focalise sur des objets du quotidien auquel nous ne prêtions guère attention, papiers d’agrumes et cagettes, alors qu’ils en disent long sur nos représentations du monde et des autres. Et qui plaira aussi à ceux qui suivent l’art contemporain de près puisqu’on y retrouve, avec plaisir, le duo Mazaccio et Drowilal en utilisateurs de Sopalin et qui clôturent l’expo de manière somptueuse, sur bâche géante illustrée de dessins ou photos d’amateur. Ainsi le pauvre et le populaire, en résumé, le modeste, se voient hissés au rang et statut d’œuvre d’art. Ailleurs, les boîtes à pizzas, ou à céréales, se métamorphosent en sculptures de porcelaine émaillée (Aubry et Broquard). Les motifs d’emballage de Carambar suscitent de superbes toiles abstraites. Les citrons, en gros plan, d’Antoni Miralda, honorent le genre de la nature morte. Le chapeau de papier de Filliou (cf. Fluxus) est aussi de la fête. Et Louise Bourgeois ressuscite son enfance en sculptant devant la caméra un personnage à partir d’épluchures d’orange. Toutefois, ce sont les motifs de cagettes présentés en compositions murales d’El Vivero, les calots publicitaires, ou les sacs plastique d’Eric Monin, toujours en référence à l’architecture, et les innombrables papiers de fruits qui retiennent le plus l’attention.  L’iconographie, le graphisme, la palette colorée, tout est fait pour suggérer le maximum de choses avec une économie de moyens qui force l’intérêt. La scénographie est labyrinthique, si bien que la surprise nous attend à chaque détour et mouvement, en grand ou petit format, en vitrine ou en documents, en tas ou déployée dans l’espace. On saluera la présence des Matons, pionniers du genre, et d’un vinyle au design ravageur confectionné par Félicité Landrivon. Le ciel à Sète est bleu come une orange. BTN

Jusqu’au 8 mars 2026

 

Philippe Cognée, Musée Paul Valéry, Sète

Sète est une ville qui aime la peinture, et notamment la figurative, française en particulier, en net regain d’intérêt chez nous depuis au moins un lustre. Philippe Cognée fait partie de ces artistes qui lui sont toujours restés fidèles même si sa technique aurait de quoi surprendre ceux qui la limitent au pinceau et chevalet. Il recourt en effet à la cire chaude et au fer à repasser, ce qui lui permit des effets de matière le distinguant de ses congénères grâce aux sensations de flou qu’il en obtient, l’image devenant souvenir indécis. De là à passer à la problématique du temps il n’y avait qu’un pas, et c’est ce thème qui se trouve mis en valeur dans ce florilège d’une centaine de tableaux s’étalant des années 80, où l’artiste s’est fait connaître, à nos jours où il s’est intéressé de plus près aux thèmes de la fleur fanée, à la forêt d’épineux ou à des paysages dits insomniaques. En fait, l’éventail de ses motifs brasse tous les genres d’autant qu’il ne se prive point de faire référence à l’Histoire de la peinture, des portraits aux paysages en passant par les vanités sous toutes leurs formes. Si la Nature et les motifs floraux (de pivoines en voie de métamorphose ou d’amaryllis en pleine transformation) lui permettent de réfléchir sur la fragilité du vivant, il ne faut pas publier les travaux anciens sur le milieu urbain, celui que l’on traverse sans le regarder vraiment et la société de consommation qui l’accompagne : supermarchés, immeubles, et même des abattoirs qui lui permettent d’œuvrer sur la carcasse animale, encore une tradition.  La technologie moderne lui suggère des villes vues du ciel (merci Google !). La peinture est son matériau de prédilection mais il ne se prive guère de puiser ses images à partir de photos, de vidéos et de reproductions en général. Un travail sériel qui soulève des questions esthétiques et politiques sans renoncer à l’humour ni à l’esprit ludique. BTN

Du 21-06 au 02-11

 

Agnès Varda, Musée Soulages, Rodez

Pierre Soulages et Agnès Varda, outre leur amitié, avaient en commun d’avoir été adopté(e)s par la ville portuaire de Sète. Le grand peintre vivait face à la mer sur l’un des flancs du Mont St Clair ; la cinéaste, qui s’y réfugia pendant la guerre, a démarré sa carrière avec La Pointe Courte. Varda à Rodez, c’est un peu la Méditerranée dans l’austère Rouergue, le littoral dans l’arrière-pays. C’est l’introduction de la trilogie Plage, Mer et ciel, si importante dans ses œuvres, dans un territoire marqué par les stèles ancestrales et la Nature sauvage. Que l’on en juge aux titres de ses œuvres : Les Plages d’Agnès, autoportrait cinématographique, La petite mer immense où se marque sa fascination pour la trilogie évoquée plus haut, Le dépôt de la cabane de plage l’une de ses réalisations de jeune plasticienne vers la fin de sa vie. Je suis curieuse. Point, titre de cette expo, résume assez bien la carrière de cette « touche à tout » qui aura excellé dans le long (Sans toi ni loi) comme dans le court métrage (Ulysse), dans la fiction (L’une chante, l’autre pas) comme dans le documentaire (Les glaneurs et la glaneuse), dans les arts plastiques (Une cabane de cinéma) comme dans la photographie (dont ses photos de Soulages, précisément). L’expo rendra compte des diverses facettes de cette créatrice complète à travers des clichés divers dont ceux pris en l’île de Noirmoutier, qu’elle affectionnait tant (avec son mari Jacques Demy), où une plage a emprunté son prénom. Des  décors de film (Le Bonheur), des documents relatifs au tournage de La Pointe courte,  la reconstitution de son cadre de vie intime à travers des œuvres de Soulages, Calder, Valentine Schlegel, Barcelo ou du photographe Gustave Le Gray, des compositions à base de tongs avec tulipes ou tuyaux… Le parcours est riche en surprises. C’est toute une vie d’images, fixes ou en mouvements, qui nous attend pour mettre du bleu à l’âme de ce musée ruthénois que l’on associe dorénavant à l’outrenoir. BTN

Du 28-06 au 04-01

Fabien Boitard, La Mouche, Pradines le Bas, Béziers

Cela fait 3 décennies que Fabien Boitard renouvelle sa confiance en une certaine peinture que l’on a l’habitude de nommer figurative mais qui, sans ses tableaux, prend d’énormes libertés avec les codes de la représentation. Le flou et le net y alternent sans gêne, la surimpression d’un château sur une tente de camping ouvre sur tous les rêves, la matière picturale ne se cache point, la logique est malmenée mais c’est parce que chaque tableau contient la sienne propre. Toutes les catégories sont convoquées : le paysage qui se soumet à la loi des pixels, le portrait iconoclaste surtout quand il s’agit des grands de ce monde, le genre animalier aves ses canards qui survolent des œufs au plat ou nous montrent irrévérencieusement leur derrière … En fait, chaque toile de Boitard est un sujet de surprise qui pousse à la réflexion. Boitard a parfaitement retenu les leçons de Cézanne relatives à la disparition de la perspective. La grille d’un château, au premier-plan, est là pour nous le rappeler. Le tableau est une surface plane où les formes et couleurs sont en un certain ordre assemblées. Le fond, en peinture, est inaccessible et l’arrière-plan n’existe pas. C’est l’un de ses axes de travail à présent. Des broussailles peintes de manière floutée s’accommodent d’une barre obturant un horizon qui ne saurait subsister en peinture, sinon comme une désuète convention d’un autre temps. Même s’il recourt à des techniques actuelles pour enrichir le champ de son exploration, Boitard ne se veut ni réaliste ni naturaliste. La peinture étant ce qu’elle est, matière et couleurs, il se plaît à la triturer dans une perpétuelle quête de nouveauté et d’étonnement. Rien de plus affligeant que le banal, le convenu, le bien léché. Ainsi ses portraits déforment-ils les visages et il lui arrive de déchirer la toile qui sert de support (pour suggérer une cravate par ex). Les paysages réservent toujours une surprise. Il les enferme en une enveloppe, géante bien entendu. On ne s’ennuie donc jamais devant un tableau de Boitard, même quand il se veut bucolique et attentif aux fleurs, à la Nature ou aux animaux, son jardin secret qu’il divulguera  dans ce joli écrin de la banlieue biterroise, celle qui s’ouvre à la culture s’entend. La (fine) Mouche. BTN

Du 07-07 au 10-10

Danse avec les Démons, Maria Lassnig, Luma, Arles

Premier volet de la prolifique saison estivale, cette triple expo, à laquelle s’ajoutent les œuvres pérennes, se déploie surtout dans la fameuse Tour. Les miracles ne résultent pas d’un vœu pieux : il faut y mettre et s’en donner les moyens. Sensing the future nous replonge dans les années 60 et de ces artistes visionnaires qui s’essayaient à l’apport en art des nouvelles technologies (E.A.T). Elle est composée de documents d’époque et de vidéos en grand format mais aussi d’une expérience cardiaque de Jean Dupuy (cocorico !), des nuages d’argent de Warhol, d’une programmation électrique de Haake… Plus proche de nous, les peintures de l’autrichienne Maria Lassnig en font l’une des artistes majeures du XXème siècle (Archives Obrist 5). Si la 1ère salle familiarise avec sa production, son féminisme avant la lettre, son humour décapant (l’oreille de Van Gogh servie pour un diner, autoportrait à la casserolle), la seconde illustre, sur toile ou sur papier, son rapport à la mythologie, celle des dieux et des animaux fabuleux. On découvre son exploration du cinéma d’animation et son ironique self-portrait, ou sa ballade autofictionnelle. Enfin une salle documentaire lui est réservée. Pourtant, c’est Danse avec les Démons qui constitue le clou de ce programme estival à voir absolument car elle déroge aux conventions de l’accrochage et fait montre d’une audace incroyable. Les œuvres murales (peinture et photos, lithos… surtout mais aussi miroirs de Jeff Koons) sont en effet disposées selon un parcours en domino, par association d’idées, de couleurs ou de formes. Les photos et impressions de Horn, Gordon, Tillmans, Struth etc. alternent ici avec un nu de Marlène Dumas, là une toile abstraite de Tobey, un paysage d’Ernst, un portrait (Beuys) de Warhol ou deux monochromes contrastés de Kelly. Côté volumes, deux Rondinone ou Schutte se font face plutôt que de nous faire face. Arp voisine avec Angela Bulloch, Giacometti avec Cattelan, un jeu d’échecs du même avec un Mac Carthy parodique… Fischli et Weiss ont droit à un atelier. Carsten Höller a installé une chambre de navire planante et robotisée d’où émerge un champignon dansant (nous sommes accueillis par ses pilules en tas, tombant du plafond). Des masques inter-réagissent avec nos mouvements et une bibliothèque circulaire est reconstituée (Campagna et Kanu). Il faut ajouter, dans le parc, la cabane au papillon et surprise oursine, de Precious Okomoyon, l’immense tour cybernétique de Parreno et les buses à brouillard de Fujiko Nakaya sur le Lac. A Luma, on fait (ou refait) les choses en grand. En l’occurrence dans la riche continuité de la Fondation Beyeler, en Suisse… Et on dit, chapeau ! BTN

Jusqu’à la fin de l’année. 2nd volet, les ateliers à partir du 05-07

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